Les vaches (folles) ont repris le chemin des champs… pas les banquiers

La crise financière secoue l’homme moderne somnolent dans le hamac de la société de consommation. Effrayé, il prend à bras-le-corps un combat destiné à sauver le système bancaire mondial: les pauvres comme les riches, les gens du Nord comme ceux du Sud, les Occidentaux comme les Orientaux, main dans la main se lancent à la rescousse de la gent financière.
M.Halot hoche la tête, un dernier coup sur son site d’informations préféré et va se coucher. Son browser lui signale qu’il vient “d’empêcher ce site d’ouvrir une fenêtre pop-up!”, il n’a jamais compris ce que pouvait être “ces machins” que son logiciel bloque à tort et à travers avec un ding assourdissant et une bande jaune qui barre son écran bleu.
M. Halot baille et lance le script de son réveil matinal, écrit par son neveu Kevin: l’ordinateur se chargera de le réveiller à 7h10 et de lancer la cafetière, et puis ira chercher son courrier électronique et charger les veilles qu’il a installées pour suivre son compte en banque et son portefeuille en bourse même si ce dernier a subi une dure cure d’amaigrissement, ainsi que les nouvelles des pipoles qu’il suit avec passion.
Tout en chargeant sa cafetière il éteint son portable, et met en veille sa radio branchée sur chose.boxe.
Il est 22h07 la chambre plonge dans un silence de mort.
M. Halot dort.
7h10 branle-bat électronique général: M.Halot se réveille. Après un passage sous la douche, il avale son café chaud tout en écoutant la radio déjà en marche, assis devant son écran. Les messages sont trop nombreux; une synchronisation avec son smart phone ayant été faite, il les consultera plus tard. Il commence à fouiller sa boîte-à-lettres dans l’escalier au risque de renverser une voisine ou de se prendre le pied dans la tapis usé; il donne des rendez-vous et répond à quelques amis.
Au premier distributeur automatique, il charge son Navigo et retire quelques euros qu’il est sûr de ne pas dépenser car il utilise depuis un certain temps le monéo.
Son trajet est bien tracé: RER, métro, bus puis 87 pas avant d’arriver à son bureau. Mais son trajet est aussi bien suivi et cela bien avant qu’il ne quitte son domicile: M.Halot laisse des traces électroniques là où il passe, et ce ne sont pas uniquement ces fameux pop-up de mouchards qui l’épient.
Tous les sites consultés, que ce soit au domicile ou au bureau ou bien encore sur son portable, sont répertoriés et permettent de dresser un profil plus ou moins exacte du consommateur-citoyen qu’il est.
A cela s’ajoutent des variantes plus personnelles telles que: l’heure de son réveil, le genre et la couleur de sites consultés ou objet de mise en veille, les petites et les grandes dépenses et même les adresses des lieux qu’il fréquente, que ce soit par localisation GPS ou par le biais de la traçabilité de son navigo ou l’abonnement taxi ou bien par le suivi de ses paiements par cartes de crédit et monéo, sans parler des contenus des ses messageries et de la teneur de ses textos, chats et msm.
Sans être un crackberry drogué de joujoux technologiques, M.Halot intéresse les sociétés de marketing qui vendent leurs études et leurs profilés multiformes (ou uniformes) à tout acheteur commercial ou politique. C’est en se basant sur ces études que se dressent plans de ventes, propositions politiques ou actions de relances.
Gérer le hasard et cerner l’ensemble des diversités que constitue la nature humaine, étaient et restent le summum des rêves de toute dictature. Prévoir le comportement de nous-consommateurs et l’orienter pour une uniformisation rentable économiquement n’est pas une action de modernité dans la gestion des manufactures des produits, mais plus une manipulation qui s’appuie sur une déviance de la science dans le seul but de gagner plus.
Tout le monde s’accorde à parler d’un “monde avant” et d’un “monde après” la crise financière. Cela rappelle le monde “avant la vache folle” et celui d’après … quand les vaches ont repris le chemin des champs et du régime végétarien. Malheureusement la crise financière démontre qu’on n’a rien appris: on pense toujours forcer la conjoncture on s’entête dans les mêmes schémas de relance en injectant plus de fonds pour boucher les trous des banquiers sans leur demander où sont passés les bénéfices antérieurs à la crise, ni en leur interdisant de manipuler pour plus de profitabilité l’homme … ce nous-consommateurs qui en fin de compte est le seul à payer.
C’est aussi cette recherche effrénée de profitabilité (baisse des dépenses) qui ligote les forces publiques et les empêche d’encadrer l’action de déviance de la science au profit des bénéfices des groupes industriels sur le dos de M.Halot ce spécimen de nous-consommateurs

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